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Quitter la terre
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21 mars 2005

"De rose alors ne reste que l'épine."

Depuis longtemps, je n’avais pas senti l’insécurité de ma parole, celle qui me semblait le voile de mon être, un masque de moi, une légèreté sur les failles. Cela remontait aux tables d’écolier où je tournais me rêvant en lui les pages d’un Mallarmé. Depuis la parole me semblait un aimable accessoire pour briller. Il y a une semaine, le dit est redevenu une mise en danger, un dévoilement qui me plaça au bord de la falaise, sur le fil de mon équilibre prétendu ; une parole une fois lancée, bientôt lancée toutes les semaines, et qui est comme un aiguillon perçant des poches bien rangées et bien fermées. Maintenant que j’ai parlé, je m’éveille à des souvenirs enfouis, par oubli ou par honte. Mais je revis ces moments passés, des errements charnels quand je croise ces regards qui épient et déshabillent. Me donner comme avant, dans cette accumulation de salissures, d’aventures sans lendemain que l’on raconte pour vouloir lui faire mal, mais qui me font mal, ces baisers que l’on ne voudrait pas continuer en éructations de jouissance. Ils me dégoûtent, je me révulse, mais le temps que nos corps se serrent l’un contre l’autre, sans que leur ardeur réchauffe quoi que ce soit, le temps que nous parvenions à jouir, je ne suis pas tout seul. Nous sommes dans une chambre, mais avec un peu de chance, un jour prochain nous marcherons ensemble dans la rue et pour une fois, je ne tournerai pas la tête sur un vide. Nous croiserons des regards qui pourront me voir comme un être normal, avec une vie partagée. Mais il n’y a pas de nous ; ces moments ne sont que ceux que deux solitudes, de la mienne avec une compagnie, qui suffit à peine à me faire sourire. Ils sont là, dans mes souvenirs, ou je les croise, comme autant de flèches venues du passé pour retrouver leurs places dans une chair mal cicatrisée. Des cicatrices que la parole n’a plus pansées, qu’elle a rouverte béantes sur le vide, sur ma solitude.
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